Les gouttes, les eaux, les guerriers – Pavlovic, Babac, Rakonjac (1962)

Zivojin Pavlovic, Marko Babac, Kokan Rakonjac (FILM COLLECTIF) – Les gouttes, les eaux, les guerriers (Kapi, vode, ratnici) – Yougoslavie – 1962 – 53 mn

Ce moyen métrage collectif produit par la Sutjeska Film (Sarajevo) est structuré en trois petits films. Il a été récompensé d’un Prix Spécial au Festival de Pula 1962. Il réunit trois cinéastes à leurs débuts puisqu’il s’agit là de leur premier film professionnel. Ainsi le précise Pavlovic dans une interview de 1984 : « A cette époque un concours a été lancé au niveau de l’Etat pour l’attribution de fonds destinés à la réalisation de moyens métrages. Quatre projets ont été retenus, dont le mien. Oto Denes a décidé de réaliser son film séparément. Par contre, Kokan Rakonjac, Marko Babac et moi avons décidé d’adopter la suggestion de notre cameraman Aleksandar Petrovic (qui a également photographié mes deux films suivants Le retour et L’ennemi, ainsi que L’odeur du corps) et de créer un film collectif (…). Le film a suscité pas mal d’intérêt au Festival de Pula 1962 et c’est ainsi que nous sommes devenus professionnels tous les trois » (interview par N. Pajkic et D. Tucakovic). Par la suite, Babac ne réalisera qu’un long métrage et poursuivra surtout comme monteur. Rakonjac décédera en 1969 après avoir réalisé six films prometteurs; il était aussi l’époux de Milena Dravic, une grande actrice du cinéma yougoslave qui était en train d’émerger à cette époque (dans des films de la Vague Noire notamment). Quant à Aleksandar Petrovic, il a donné lieu à une longue carrière cinématographique dans la photographie, y compris sur des films de la Vague Noire. Outre Pavlovic, il a travaillé sur des films de Rakonjac (tels Le traître en 1964, Divlje-« les graines sauvages » en 1965) ou encore de Dusan Makavejev et Alexandar Petrovic.

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Les cinéastes étaient alors membres du Ciné-club « Belgrade », une structure très dynamique où ils ont fait leur débuts, en particulier Marko Babac qui s’y trouvait depuis l’âge de 16 ans. Plusieurs cinéastes importants ayant émergé dans les années 60 ont connu un début de parcours très lié aux ciné-clubs yougoslaves. Le blog reviendra prochainement sur ce lieu à travers d’autres courts métrages réalisés dans ce cadre.

Film intégral en VO non sous-titrée, avec dans l’ordre :

  • Pavlovic – Les eaux vives (situé en 1943, sans dialogues)
  • Babac – Les guerriers (deux patients dans une chambre d’hôpital)
  • Rakonjac – Les gouttes (un alcoolique et sa petite amie). Participation de Makavejev

 

Ce film collectif est donc l’occasion de découvrir les débuts de jeunes cinéastes. Malheureusement cette version trouvée sur internet ne dispose pas de sous titres et complique le visionnage, hormis la partie réalisée par Pavlovic qui n’a pas de dialogues. Une vision inquiétante de la réalité s’exprime, comme annonciatrice d’une tendance en germe dans le Novi Film yougoslave. Pavlovic y révèle déjà un attrait pour des lieux à la marge, tout comme un de ses courts métrages amateurs intitulé Triptyque de la matière et de la mort (1960). Pour cette réalisation Les eaux vives, il obtient aussi un prix spécial au Festival de Pula 1692 (en plus du prix spécial pour l’ensemble du film collectif). Un prix spécial supplémentaire qui fut également donné à Petkovic pour l’ensemble de sa contribution.

L’année suivante (1963) la même équipe a réalisé un deuxième film, intitulé La ville (relayé ICI sur le blog). Mais il ne passa pas la censure. Considéré comme une menace pour la société socialiste, il fut officiellement interdit à la distribution jusque 1990. Une censure qui s’accompagna de sérieux obstacles pour chacun du trio, les empêchant de travailler dans le cinéma. Ainsi Pavlovic partait quelques temps en Slovénie (comme à d’autres moments de sa carrière où ses réalisations le confrontèrent à des difficultés en Serbie), Rakonjac retrouvait le cinéma amateur où le Ciné-club « Belgrade » allait produire ses premiers longs métrages et Babac s’orienta dans le montage.

4 réflexions sur “Les gouttes, les eaux, les guerriers – Pavlovic, Babac, Rakonjac (1962)

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