Minguettes 1983. Paix sociale ou pacification ? – Agence IM’media (1983)

EN ENTIER – Minguettes 1983. Paix sociale ou pacification ? – Agence IM’media – 23mn – 1983 – Remasterisé en 2013 avec des images inédites

En décembre prochain sera commémorée la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983. C’est ainsi que des textes et retours réflexifs se multiplient (par exemple un cycle de textes ICI sur le site internet du PIR), que des initiatives audiovisuelles voient le jour, et que différentes manifestations sont organisées – à ce propos, je renvoie à la note ICI sur le blog qui fait un retour sur la commémoration de la Marche.

L’Agence IM’media vient de remasteriser un film de 1983 qui se situe aux environs de sa création, et dont les aspects sont incroyablement pertinents au regard d’aujourd’hui, au-delà d’une mémoire de la genèse de la Marche et d’un lieu de la banlieue lyonnaise. L’apport des paroles des habitants est sans égal dans d’autres documentaires qui vont en général privilégier les « spécialistes » du développement urbain, les politiques prenant les décisions (y compris de répression) etc. On sent bien ici, avec notre recul, la genèse d’IM’media, en quelque sorte, dans ses approches privilégiant les mémoires des luttes, le relais audiovisuel depuis un autre angle (celui de l’intérieur des quartiers, des immigrations etc), sans passer outre le schéma « explicatif » d’une situation. Par ailleurs le rôle des médias y est bien criblé, ce qui ajoute une tonalité criante de pertinence du documentaire. C’est une vidéo qui pourrait figurer dans la revue non exhaustive ICI de videos/films portant sur les rénovations urbaines. Dans ce dernier domaine, on appréciera au passage les langues institutionnelles en complet décalage avec les réalités des habitants et habitantes. Je relaie ci-dessous le film et le texte d’IM’media accompagnant la diffusion, sans omettre au passage de mentionner ICI un communiqué du MIB 34 (Mouvement Immigration Banlieue) de la région de Montpellier où l’auto organisation et les dynamiques collectives de quartier sont mises en avant contre la (supposée) représentation politique des élus pour les habitants, notamment en période électorale.

« Minguettes 1983 – Paix sociale ou pacification ? a été tourné au cœur des événements du printemps et de l’été 1983 à la Zup de Vénissieux, dans la banlieue lyonnaise. Des événements à l’origine de la Marche pour l’égalité et contre le racisme, qui traversera la France profonde du 15 octobre au 3 décembre.

Réalisé dans le cadre d’un stage média organisé à Bron / Lyon II – qui donnera naissance à l’agence IM’média-, ce film est un « objet filmique non identifié ». Un « OFNI », entre journal de bord, reportage vidéo « embedded », contre-information, décryptage des mass media et film d’atelier. Il a été diffusé en boucle lors de l’exposition « Les Enfants de l’immigration » au centre culturel G. Pompidou (Beaubourg – janvier/avril 1984).

Pour les 30 ans de la Marche, IM’média a procédé à la restauration de ce film et en propose une nouvelle version remastérisée. Tout en restituant son écriture documentaire initiale, il donne à (re)voir la contre-offensive « pacifique » des habitant-e-s de la Zup suite à un cycle infernal d’affrontements avec la police, de la bataille rangée du 21 mars 1983 jusqu’à cette soirée du 19 au 20 juin où un policier tire et blesse Toumi Djaïdja, le jeune président de l’association SOS Avenir Minguettes.

Des images d’époque inédites présentent une Zup loin des clichés sur le « ghetto maghrébin » et sur une « zone interdite » livrée aux « loubards ». A l’occasion du dynamitage spectaculaire de tours, les habitant-e-s de toutes origines, jeunes et vieux, donnent leur avis sur les « erreurs d’urbanisme » et sur une autre politique du logement possible. « On s’appelle tous Toumi Djaidja », clament-ils aussi, aux côtés de Christian Delorme et de Jean Costil (Cimade), pour manifester leur solidarité avec Toumi qui, sur son lit d’hôpital, a l’idée de lancer la Marche comme une « main tendue ». Une idée présentée lors de « Forums Justice » conjointement avec celle d’un rassemblement national des familles des victimes des crimes racistes et des violences policières devant le ministère de la justice place Vendôme, à l’instar des Folles de la place de mai en Argentine. Face à l’acharnement policier ou judiciaire, face au racisme, au délire sécuritaire et à la complaisance de la plupart des médias, l’objectif est alors de se mobiliser pour rétablir la vérité des faits, d’obtenir justice, de pouvoir vivre, tout simplement. 

Le 3 décembre 1983 à Paris, 100 000 personnes se rassemblent pour l’arrivée de la Marche. L’instant est à l’euphorie, collective, fusionnelle. Et l’espoir d’aller vers l’égalité sociale et raciale dans une société plurielle immense …

Contact pour obtenir le film : agence.immedia -at – free.fr «